

Saint Exupéry disait :
« Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose…
Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer. »


Remettre l’humain au cœur de l’entreprise ? Cette proposition est enthousiasmante à condition de prendre le sujet par le bon angle et avec une véritable intention.
En effet, il y a quantité de littérature sur le sujet. Très peu d’entre elle parle réellement de l’humain. On y parle plus souvent de bien-être, de salariés heureux, des clés de la motivation, de la performance liée à la motivation, de l’engagement individuel et de ses bénéfices pour le collectif. On y parle de l’humain au service d’une performance individuelle et collective. Si pour que la performance advienne, il convient de travailler le bien-être sous une forme ou une autre, alors investissons dans le bien-être.
Mais si le bien-être peut se travailler et s’investir via des choses matérielles ou des facilités techniques, « notre être bien d’humain » implique une autre approche et une autre intention.
Pour remettre l’humain au cœur du collectif nous n’échapperons pas à la question suivante : « Comment des humains ont créé des collectifs, en particulier professionnels, dans lesquels l’humain n’a pas de place ? »
Et cette question nous conduira certainement vers un nouvel espace dont les contours se dessinent autour d’un mieux se connaitre et mieux comprendre autrui.

Albert Einstein
Être intelligent et efficient collectivement nécessite de se rencontrer au-delà de nos égos.
Le fondement de l’égo est la séparation. Si cette logique est nécessaire et utile dans bien des espaces, elle est, par définition, stérile quand on cherche à être intelligent à plusieurs.
Être intelligent collectivement c’est décider de mettre le sens et le développement du bien commun au cœur de nos actions.
Au-delà des outils et des méthodes utiles au bon moment, c’est donc d’abord et avant tout, une faculté des individus à partager leurs représentations des situations, à identifier les enjeux et limites tant individuels que collectives qui permet l’émergence du sens, comme l’image d’un puzzle ne peut émerger que quand tous les morceaux du puzzle sont réunis. .
Ensuite, à partir de ce nouvel espace, au-delà des séparations initiales, chaque acteur peut mettre sa volonté et son intelligence au service de la définition d’un « comment », une solution qui réponde aux enjeux du bien commun.

Si on s’entrainait à voir au-delà de nos masques et de nos personnalités respectives ? Et si on encourageait chacun à exprimer son unicité dans le cadre du collectif ?
Certains se disent déjà que ce serait le désordre. Oui assurément si on entend « exprimer son unicité » comme la capacité de donner son avis sur tout. L’enjeu n’est évidemment pas là. D’ailleurs si je suis dans mon unicité, je n’ai aucune raison, ni envie, de donner mon avis sur tout.
Dans le cadre du collectif, un grand classique, c’est de faire des réunions pour aboutir à des solutions (qui ont le mérite de nous rassurer). Oui certes, il est nécessaire d’identifier un comment, mais un comment n’est qu’une forme. Et de multiples formes peuvent répondre à un même enjeu. La véritable intention d’une réunion devrait d’abord être de partager notre vision de la situation. Et chacun depuis son point de vue propre, son unicité, a un des éléments du puzzle qu’il doit pouvoir exprimer.
C’est uniquement en acceptant la vision de l’autre que nous pourrons construire une vision partagée.
Et chacun se sentant accepté, apprécié, dans sa vision, donc dans son unicité, va donner le meilleur de lui-même pour construire une solution, un comment performant.

Si le monde était simple, ce serait simple, il y aurait des réponses simples à des questions simples. Mais ce n’est pas comme ça !
Peut être, d’ailleurs que la vie n’a jamais été simple, mais que nous nous la rendions simple parce que nous ne savions pas l’appréhender autrement. Notre développement actuel nous permet peut-être juste d’aborder la vie de manière plus complexe ?
Hier dans l’entreprise, on simplifiait les problèmes. Il y a avait celui qui avait raison et celui qui avait tort. Il y avait celui qui était chef et celui qui ne l’était pas. Il y avait de l’ordre. Le chef disait de faire et l’exécutant exécutait. Oui je simplifie aussi !
Désormais, cette façon de faire atteint ses limites. Comme tout système, un jour où l’autre. Le propos n’est pas de dire que ce sera mieux demain qu’hier. Ça, ça dépend un peu de chacun de nous. Par contre, il est quand même a peu près acquis que nous n’échapperons pas à la pensée paradoxale !
Le paradoxe est une invitation à la réflexion, au delà des contradictions apparentes.
Le paradoxe, c’est le domaine du ET et non celui du OU :
- La vie est merveilleuse et tragique à la fois !
- Le JE a besoin du NOUS pour devenir JE
- Ma raison m’enseigne que je ne peux tout comprendre..
Il est plus facile de se simplifier la vie en privilégiant une idée plutôt qu’une autre. Mais en faisant cela on se prive d’une énergie vitale à partir de laquelle le sens peut émerger. La pensée paradoxale nous invite à chercher l’unité au-delà des contraires apparents.
Le monde de l’entreprise est un monde de raisonnement par excellence. Il convient de résoudre des problèmes, de présenter, d’expliquer, de convaincre, de décider, de comprendre, etc…
Bref, en entreprise, on raisonne ! et parfois, on joue à celui qui raisonne le mieux !
S’il a des qualités autant indéniables que remarquables, le raisonnement à un gros défaut : il nous coupe au moins d’une partie du réel. En effet, nous ne pouvons pas apprécier le goût de l’orange à travers notre mental ! Nous ne sommes pas touchés par la beauté de la nature à travers notre intellect ! Nous n’aimons pas à travers des idées et des concepts. Nous aimons à travers des sensations !
Identifier les enjeux d’un individu, comme d’un collectif implique de lâcher le mental, pour sentir ce qui se joue.
Créer un collectif performant nécessite de moins raisonner pour mieux résonner. Être moins dans sa tête, plus dans ses sensations. Arrêter d’expliquer pour raconter l’histoire, le vécu. Quitter le formel pour l’informel et la spontanéité de l’instant. C’est juste une autre façon d’appréhender la réalité. Une façon complémentaire à l’analyse rationnelle.
Ni mieux ni moins bien, nécessaire..